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AMNÉSIE SCIENTIFIQUE et AMNÉSIE SOCIALE

Danièle Starenkyj

Depuis quelque temps, il semble qu’il soit suffisant d’accoler à un produit quelconque les épithètes

« biologique », « écologique », « équitable », « local », pour le bonifier instantanément.


Ainsi, après quelques décennies d’abstention chez ceux qui étaient soucieux de leur santé, c’est allègrement qu’oubliant le jus de raisin, le café de céréales, les tisanes et la caroube, on s’est remis, la conscience en paix, à consommer vin et bière, café et thé, et cacao, bien sûr, biologiques !


Mais, il semble que la science y soit pour quelque chose…


DES « VERTUS » SOUTENUES PAR DES ÉTUDES…


À une époque où l’on a pu leurrer des millions de femmes à croire à l’innocuité de la toxine botulinique* pour les rajeunir, peut-on être surpris de ces gros titres :


-- le cacao « l’un des aliments les plus protecteurs qui soit sur le plan cardiovasculaire » ;

-- le café qui « réduit les lésions hépatiques » ;

-- le thé « contre la maladie d’Alzheimer » ;

-- le vin « bon pour le cœur » ?


On brandit souvent devant le grand public le mythe de la progression constante de la connaissance. On parle de nouvelles études qui contredisent les anciennes. On cache que l’oubli, tout autant que l’aptitude à se souvenir des moindres détails, peut aussi affecter la science.

QUAND L’ALCOOL PASSE SOUS LE RADAR


Une de ces amnésies scientifiques très sérieuses touche l’ALCOOL.


Après la Prohibition nationale (1919-1933) débouchant sur la dépression des années 30 aux États-Unis, désireux de se distancer des moralistes du Mouvement de la Tempérance, les scientifiques médicaux se sont évertués à minimiser et à taire les effets dangereux de l’alcool. La cirrhose, la cardiomyopathie, les difformités fœtales, le cancer de l’œsophage, bien connus dès le début du 20e siècle, ont été ignorés au cours des années 30, 40 et 50 pour n’être « redécouverts » qu’à partir de la fin des années 60 et 70 mais sans le proclamer sur les toits.


La science parle d’« une éclipse » de la connaissance et un auteur pose cette question : « Comment les effets de l’alcool sur la reproduction humaine ont-ils pu devenir inintéressants ? »


Ne voulant passer ni pour prude ni pour fanatique, la médecine des années 30,40 et 50 a mis en place un nouveau paradigme : ce n’était pas l’alcool qui était mauvais mais l’ALCOOLISME, et comme cette réaction à l’alcool semblait ne pas toucher obligatoirement tous les buveurs, le reste des buveurs déclarés non alcooliques pouvait continuer à boire impunément.


Et c’est ce qui se passe depuis. L’amnésie se poursuit mais avec une variante au 21e siècle, on cherche à imposer un snobisme de la consommation : criminelle au volant de sa voiture mais bonne au volant de sa vie ! La clé du mystère serait la modération…


Le Fonds Mondial de recherche contre le cancer (World Cancer Research Fund --WCRF) et l’Institut américain de recherche sur le cancer ((Internatioal Agency for Research on Cancer-- IARC) déclaraient déjà en 1997, quatre choses incontournables sur l’alcool :


1. Il n’existe aucun besoin physiologique pour l’alcool sous n’importe quelle forme

2. Aucune recommandation n’a jamais été faite en faveur d’une augmentation de la consommation d’alcool.

3. L’alcool sous toutes ses formes est addictogène.

4. L’alcool sous toutes ses formes est une substance cancérogène pour les humains. Il est classé dans le groupe 1 des substances cancérogènes pour les humains par l’IARC.


L’ALCOOL ÉGAL AU TABAC


En 2004, l’OMS tirait la sonnette d’alarme et affirmait haut et fort : « L’alcool est égal au tabac » dans son impact sur la santé et « boire ne serait-ce que de petites quantités d’alcool » augmente grandement les risques de blessures mortelles, d’être atteint d’un ou de plusieurs des huit cancers liés à la consommation d’alcool (particulièrement le cancer du sein chez les femmes), d’être déprimé, d’avoir des idées suicidaires, et de passer à l’acte.


LA LUTTE ANTITABAC, un véritable succès


Au 20e siècle, il s’est gagné au Canada une lutte titanesque contre le tabagisme. Des lois antitabac très sérieuses ont été votées et enforcées. L’interdiction de fumer dans les lieux publics a entraîné une diminution des fumeurs ainsi que du nombre de cancers du poumon, particulièrement chez les hommes.


À QUAND LA LUTTE CONTRE L’ALCOOL ?


À quand l’interdiction de s’enivrer en public, de faire de la publicité incitant à boire (en ciblant particulièrement les femmes), de toute publicité favorable à l’alcool dans les médias ? À quand une restriction de l’accès aux bouteilles dans les magasins, et la limitation des heures d’ouverture pendant la semaine et la fin de semaine des débits de boissons ?


À quand l’obligation d’apposer sur les bouteilles des mises en garde frappantes, en gros caractères, avec des messages renouvelés illustrant les méfaits de l’alcool ? Par exemple, des photos d’enfants atteints du syndrome d’alcoolisme fœtal ?

À QUAND LA FIN DE L’AMNÉSIE SOCIALE FACE À L’ALCOOL ?


C’est incontournable : L’alcool est TOUJOURS toxique, addictif, tératogène et cancérogène. Sans aucune exception, il nuit toujours à la santé physique, mentale, sociale et spirituelle de ceux qui boivent.


Mon père, que les médias canadiens ont présenté à plusieurs reprises comme étant « l’apôtre des fumeurs », et comme étant le fondateur du Conseil québécois sur le tabac et la santé (CQTS), mais aussi comme « un apôtre de la tempérance » chérissait le concept noble de la maîtrise de soi. Il luttait donc également contre l’alcool et, par l’exemple et la parole, petite, il me mettait en garde contre ses effets dégradants en me lisant un texte trois fois millénaire intitulé « Portrait de l’ivrogne ».


Permettez-moi de le partager avec vous.


« Pour qui les « Malheur ! », pour qui les

« Hélas ! » ?

Pour qui les querelles, pour qui les plaintes ?

Pour qui les blessures inutiles ?

Pour qui les yeux rouges ?

Pour ceux qui s’attardent après du vin,

pour ceux qui aiment déguster les vins parfumés.

Ne regarde pas le vin lorsqu’il est d’un beau rouge, qu’il déploie sa robe dans la coupe

et qu’il coule aisément.

Par la suite il mord comme un serpent,

il pique comme un aspic.

Tes yeux se porteront sur d’autres femmes,

ton cœur parlera d’une manière perverse.

Tu seras comme un homme couché au cœur de la mer,

comme un homme couché au sommet d’un mât :

« On m’a frappé, et je n’ai pas eu mal !

On m’a battu, et je n’en ai rien su !

Quand me réveillerai-je ? J’en redemande encore ! » (Proverbes hébraïques 23. 29-35, La Bible.)


CONCLUSION


Je vous invite à adopter l’abstention comme mode de vie sain, en disant tout simplement : « Non merci, je ne bois pas ». Détachement volontaire, véritable richesse, l’abstention débouche sur cette victoire héroïque pour laquelle il vaille la peine de combattre : la maîtrise de soi dans le respect des autres. 


* Dès 2008 et 2009, les bémols sont apparus : certains antirides populaires à base de la toxine botulinique ont à leur compte des mortalités ; la toxine peut se répandre dans le corps et entraîner une paralysie respiratoire avec difficultés d’avaler, de parler clairement, de tenir sa tête, affaissement des paupières, pneumonie… Certes il a toujours fallu souffrir pour être belle mais… à ce point ?


 ©2025 Danièle Starenkyj

SOURCE

Danièle Starenkyj, LA SANTÉ TOTALE, Orion, 2009.

 
 
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